2014-03-26 13:26
Prenez l’épisode le plus glauque interdit au moins de 16 ans de la série “Criminal minds”, multipliez-le par un million et vous serez encore loin du compte ! Si tant est que l’on aime ce genre (littéraire, télévisuel ou cinématographique), c’est-à-dire la version hardcore du Giallo (en gros : sorte de roman policier... La culture c’est comme la confiture...), je pense qu’on est clairement face à un chef-d’œuvre. Généralement, lorsqu’on se plonge dans l’intrigue, on est déçus car le dénouement est presque toujours édulcoré : on se dit “si ça se passe comme ça, c’est énorme mais ils n’oseront jamais !”, on espère secrètement éviter le happy-end et finalement, ça tourne au mieux à l’explication rationnelle simpliste, au pire au moralisme ou au grotesque. Ou alors on voit tout venir à des kilomètres et ça en devient frustrant, voire gonflant. Car ce genre d’histoire joue sur notre propre côté psychopathe (fort heureusement inhibé), où l’on s’aperçoit que notre imagination peut être vraiment flippante tant elle est fertile niveau horreur. Or là, pas du tout, justement : Il ose, Donato Carrisi, nous exposer le Mal à l’état pur, où l’on se dit cette fois-ci : “nan, il va pas aller jusque là... Rh0oooo p*tain siiiii !!!!!!" Et où on dort avec la lumière allumée après avoir vérifier 10 fois en mode “Versailles” dans l’appartement que les enfants respirent toujours et où on bénit la météo de nous gratifier du certainement unique orage apocalyptique nocturne de la saison ! Même si l’on comprend assez rapidement les mécanismes narratifs, passé le 1er Cliffhanger (en mode : “ah ouais, tu veux la jouer comme ça, ok on va jouer !”), on se laisse à chaque fois prendre au piège. On arrive même à concevoir le comportement souvent aberrant de la fliquette, mi-suicidaire mi-impulsive mi-boulet à la “Debra Morgan” (oui ça fait 1 et demi !), alors qu’on est bien conscients de sa tendance à se jeter dans la gueule du loup (“mais oui, t’as raison, suis ton instinct, vas-y, fais un groupe de 1 en pleine nuit, sans prévenir personne de ton équipe avec la batterie de ton portable sur le point de tomber en rade !!!”)... Ainsi, Carrisi joue avec nos peurs et nos angoisses primaires en nous démontrant par a+b que non seulement le crime parfait existe (n’en déplaise à Messieurs Colombo et consorts), mais que les crimes en série parfaits aussi et plus encore que les multiples crimes en série parfaits itou ! Et surtout, le monstre dont il est question ici est un homme, rien qu’un homme, d’une intelligence supérieure certes mais que, contrairement aux vampires, aux loups-garous et autres créatures fantasmées, il peut être bien réel (et j’aurai l’air bien con lors de la prochaine Zombie apocalypse après avoir dit ça !). En résumé, le “chuchoteur” ne serait-il pas l’auteur lui-même, tant il réussit à manipuler notre esprit, à instiller intuitions, méfiance et doutes dans la tête du lecteur pour mieux les faire disparaître et nous les renvoyer en pleine tronche quand on s’y attend le moins ?